Mgr Ébacher IV - Héritières et héritiers avec le Fils
Dieu a promis à Abraham qu’il aurait un héritier. Pourtant ce couple est stérile. Mais Abraham et Sara ont continué à croire, malgré tout et contre tout. Ils ont tenu bon, faisant confiance et espérant. Ils ont, comme le dira saint Paul, « espéré contre toute espérance ». Dieu a tenu parole.
Et il en fut ainsi de génération en génération : Jacob, Moïse, David… L’histoire sainte est un long désir, une attente sans cesse relancée en avant. Cette dynamique de vie, alimentée et continuellement édifiée par la promesse divine, « sous-tend la bible tout entière, et en fait le livre de l’espérance, cette petite espérance plus forte que l’expérience, dirait Péguy, qui survit aux épreuves et renait plus forte après les échecs[1]. »
Dès sa première parole, l’auteur de la Lettre aux Hébreux situe Jésus, le Fils de Dieu incarné, au centre, au cœur, au sommet de cette espérance millénaire. Il en est l’accomplissement parfait, final : « Dieu, […], en ces jours où nous sommes, […] nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses. » (Heb., 1, 1-2)[2]
Jésus est l’héritier longuement désiré. En lui, l’aspiration de tous ses ancêtres est comblée. Et tous ceux et celles qui croiront en lui avec persévérance parviendront à l’héritage avec lui !
Comment Jésus, l’héritier de toutes les promesses divines à l’humanité, a-t-il obtenu cet héritage ? Lors de sa passion et de sa mort, avec obéissance filiale, mais aussi avec cris et larmes et grande patience, il a tenu bon dans les épreuves. Puis, ressuscité et montant aux cieux, il a atteint le but : le trône céleste du Père, ce lieu des biens définitifs (Heb. 9,11). Il a instauré la nouvelle création, lieu du bonheur éternel (Heb. 12,28).
Il a le pouvoir de nous soutenir et nous encourager fortement, dans ce pèlerinage où, marchant à sa suite dans le chemin qu’il a ouvert, nous obtiendrons l’héritage. Bien plus, il nous prend en charge. Par Lui, avec Lui, en Lui, « ceux qui sont appelés peuvent recevoir l’héritage éternel jadis promis. » (Heb. 9, 15). Cet héritage est le monde éternel et divin, notre bonheur, la joie et la vie éternelles.
Et les anges sont des esprits « envoyés pour le service de ceux qui doivent avoir en héritage le salut ». (Heb.1, 14) Ils ont pour mission de nous accompagner dans ce chemin tracé par Jésus vers notre plein épanouissement.
Mais ce don de la vie éternelle, venant de l’alliance avec Jésus, signée de son sang, ne s’impose pas. Il doit être accueilli par une foi tenace et un amour actif, en marchant dans le chemin suivi par notre Sauveur. Pour nous inciter à une telle vigilance, l’auteur de cette homélie cite l’exemple malheureux d’Ésaü « qui vendit son droit d’aînesse en échange d’un seul plat. Vous savez que par la suite, quand il voulut recevoir en héritage la bénédiction, il fut rejeté. » (Heb. 12, 16-17)
Certes, nous sommes toujours dans une alliance de miséricorde avec Jésus. Alors, il ne faut être ni présomptueux ni désespérés. Mais c’est notre responsabilité d’accueillir ce don. Et l’Esprit est là pour nous y inciter.
D’où les fortes exhortations de l’homéliste :
« Soyez vigilants : que personne ne se dérobe à la grâce de Dieu. » (Heb. 12, 15)
Encore :
« Ne devenez pas paresseux, imitez plutôt ceux qui, par la foi et la persévérance, obtiennent l’héritage promis. » (Heb. 6,12)
Et encore :
« Vous êtes venus vers Jésus, le médiateur d’une alliance nouvelle, et vers le sang de l’aspersion, son sang qui parle plus fort que celui d’Abel. Prenez garde, ne refusez pas d’entendre celui qui vous parle. » (Heb. 12, 24 -25)
Soyons des « pèlerins d’espérance ». Vivons dans la foi en Jésus, persévérons avec courage et patience dans l’espérance, aimons-nous les uns les autres par la force de l’Esprit. Tenons ferme dans le rassemblement de notre communauté. Et persistons dans la prière en reprenant le traditionnel « acte d’espérance » :
Mon Dieu, j’espère avec une ferme confiance
que vous me donnerez, par les mérites de Jésus-Christ,
votre grâce en ce monde et le bonheur éternel dans l’autre,
parce que vous l’avez promis
et que vous tenez toujours vos promesses.
Amen
† Roger Ébacher
18 février 2025
[1]
A. Gelin, Les Idées maîtresses de
l’Ancien Testament, Les Éditions du Cerf, 1969, pp. 27-28. Ce petit
livre fait l’histoire de cette espérance.
[2]
À moins d’indication contraire, dans ces textes je citerai la Lettre aux Hébreux telle que formulée
dans : La Bible. Traduction
officielle liturgique, Mame 2013.
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