Mgr Ébacher XI - L’ancre qu’est notre espérance

 

Une parole de la Lettre aux Hébreux (6,18-20) a attiré mon attention, m’a surpris, intrigué, poussé à en creuser le sens. La voici : « Il est impossible que Dieu ait menti. Cela nous encourage fortement, nous qui avons cherché refuge dans l’espérance qui nous était proposée et que nous avons saisie. Cette espérance, nous la tenons comme une ancre sûre et solide pour l’âme; elle entre au-delà du rideau, dans le Sanctuaire où Jésus est entré pour nous en précurseur. »

Quand je visitais les villes et villages de la Côte-Nord du Québec, j’ai souvent vu des navires plus ou moins gros à l’ancre. Mais je n’ai jamais réfléchi aux rôles de l’ancre, à sa raison d’être, à tout ce qu’elle peut symboliquement éveiller dans l’imagination et dans le cœur. 

J’ai donc cherché et voici ce que j’en retiens. « L’ancre est un équipement de sécurité nautique à avoir obligatoirement sur son bateau. […] L’ancre est l’une des pièces les plus importantes de tout bateau, car elle peut vous maintenir en sécurité et stable en cas de vents forts ou de mouvements d’eau. Cette situation est particulièrement dangereuse lors du sommeil ou lorsqu’il y a des nageurs à proximité de votre bateau. » (Institut national de sécurité nautique)

Lisant ces rôles de l’ancre, j’ai compris qu’elle est capable de résonner fortement au cœur des croyants et des croyants en Jésus. Que de bourrasques, que de tentations de sommeil ou de somnolence dans notre suite de Jésus, que de nageurs autour de nous qui cherchent à nous entraîner dans d’autres eaux!

C’est avec grande joie que je trouve dans les écrits du pape François de nombreuses références à cette image de l’ancre. Il semble l’avoir particulièrement appréciée pour évoquer la nécessité et les rôles de l’espérance dans la vie chrétienne.

Le 27 mars 2020, alors que se déferle une grande pandémie sur le monde, le pape François affirme : « Nous avons une ancre : par sa croix, nous avons été sauvés. Nous avons un gouvernail : par sa croix, nous avons été rachetés. Nous avons une espérance : par sa croix, nous avons été rénovés et embrassés afin que rien ni personne ne nous sépare de son amour rédempteur. »

Dans la bulle qui annonçait le grand jubilé sur l’espérance de l’an 2025 (no 25), après avoir cité Heb 6, 18-20, François écrit : « L’image de l’ancre évoque bien la stabilité et la sécurité que nous possédons au milieu des eaux agitées de la vie si nous nous en remettons au Seigneur Jésus. Les tempêtes ne pourront jamais l’emporter parce que nous sommes ancrés dans l’espérance de la grâce qui est capable de nous faire vivre dans le Christ en triomphant du péché, de la peur et de la mort. Cette espérance, bien plus grande que les satisfactions quotidiennes et l’amélioration des conditions de vie, nous porte au-delà des épreuves et nous pousse à marcher sans perdre de vue la grandeur du but auquel nous sommes appelés, le Ciel. »

Dans son « Autobiographie » intitulée : « Espère », publiée en français en 2025, en page 337, le pape François écrit : « L’espérance est une ancre ». Puis il décrit les catacombes romaines. Les premiers chrétiens se servaient de ce symbole de l’ancre comme signature dans ces lieux de refuge. Et il note : « L'ancre de notre espérance, c'est le Christ auprès du Père. »

Je retiens enfin quelques phrases du message écrit par le pape François pour le carême 2025 : « Sœurs et frères, grâce à l’amour de Dieu en Jésus-Christ, nous sommes gardés dans l’espérance qui ne déçoit pas (cf. Rm 5, 5). L’espérance est “l’ancre de l’âme”, sûre et indéfectible. »

Cette interpellation de l’homéliste (Heb 6, 18-20) est bien une invitation forte à ne jamais perdre l’espérance qui nous a été donnée comme une promesse, à nous y agripper de toutes les forces vives de notre cœur et de notre volonté. Agrippons-nous fermement à cette ancre, notre espérance, par une foi bien éveillée et un amour toujours brûlant pour Jésus et pour nos frères et sœurs.

Oui, « cette espérance, nous la tenons comme une ancre sûre et solide pour l’âme. »

Et prions pour le pape François, décédé le lundi saint 21 avril 2025. Qu’il repose plein de la joie pascale dans ce havre de paix et de fraternité qu’il a tant désiré : le Ciel.

† Roger Ébacher

24 avril 2025